jeudi 6 juin 2013

Epreuve d'Institutions administratives en Droit 1 : ce qu'il fallait faire

Le sujet de la première session cette année, le même à Laval et au Mans, a été, il est vrai, une petite surprise puisqu'il s'agissait de "donner son opinion" suite à la lecture d'un article du Monde.
Bien que le temps imparti soit de seulement une heure, le texte était court et sans piège, sur un thème d'actualité, bref la difficulté était modérée.
Il est bien évident qu'au niveau universitaire, on n'attend pas simplement d'une copie qu'elle paraphrase le texte en recopiant plus ou moins son propos. L'exercice consiste à rebondir sur les propos de l'auteur ou des personnes citées, pour argumenter, enrichir l'information qui est donnée. Si le sujet demande votre opinion, vous devez dire davantage que l'auteur, même si vous êtes totalement d'accord avec lui.
Pour cela, il faut impérativement utiliser le cours. Inutile d'aller inventer des carambouilles. L'enseignant veut savoir si vous avez appris votre cours et si vous êtes capable de faire le lien entre ce cours et le sujet.

Ceci étant, le sujet ne consistait pas simplement à répéter des définitions que l'on jetterait dans la copie à plus ou moins bon escient.

En l'espèce, on vous demandait votre avis sur le référendum local tenu en Alsace, qui était un "territoire idéal" pour la fusion des deux conseils généraux et du Conseil régional en une collectivité unique. Une victoire du oui était très probable, puisque les grands partis étaient pour et les sondages étaient favorables. Pourtant, ce fut un échec cuisant. On vous invite donc à reposer le problème initial : pourquoi faut-il réaliser des fusions de collectivités locales ? En quoi cela consiste-t'il ? Est-ce une bonne chose ? Quelles auraient été les conséquences d'une réussite du réferendum ?
On vous invite aussi à réfléchir aux causes de l'échec. Il suffit de s'appuyer sur un peu de culture générale et politique, en puisant aussi dans ce que vous ont appris d'autres enseignements de Droit première année (droit constitutionnel). Rien que de basique...

Inutile de formaliser un plan dans une épreuve d'une heure, mais il faut tout de même exposer ses idées dans un ordre logique.

En l'espèce, il était nécessaire d'évoquer d'abord "la fusion des collectivités locales", puis le problème du réferendum local.

I) L'Alsace, un territoire idéal pour lancer la réforme de la fusion des collectivités locales


A ) Les fusions

J'attendais que les étudiants évoquent le fameux "millefeuille" français des institutions auquel les citoyens ne comprennent plus grand chose, et qui créé des doublons, des lourdeurs, des chevauchements de compétence. Le texte évoque le fait que "l'on se marche sur les pieds", et la nécessité de faire des économies. L'étudiant doit comprendre que les dépenses publiques de fonctionnement (la masse salariale des agents administratifs) ne génère pas beaucoup de richesses en ce sens que, l'argent économisé par la suppression de doublons de postes pourrait être mieux investi par les collectivités dans un soutien à l'économie, par des travaux publics, etc. J'ai été stupéfait de lire dans beaucoup de copies, que le fait de supprimer quelques postes de directions dans les collectivités alsaciennes allait "augmenter le chômage". C'est vraiment un raisonnement simpliste à très courte vue, puisque l'argent public de quelques postes peut être utilisé à créer des emplois dans le secteur privé (mieux former les actifs, commander des équipements publics aux entreprises françaises locales etc).

S'agissant des fusions, les étudiants savaient que la France n'arrive pas bien à les réaliser. Il fallait rappeler le relatif échec de la loi Marcellin de 1971, comparé aux réussites de fusions nombreuses en Europe.
Mais, il fallait aussi dire que le législateur avait su réagir depuis quelques années. Il y a eu des exemples de collectivités territoriales uniques en Outre-Mer ! Il fallait les évoquer puisque le projet alsacien était en fait du même genre, mais sur le continent.
L'Alsace premier territoire pour réaliser des fusions en métropole pourquoi ? Evidemment il fallait rappeler l'histoire particulière de l'Alsace, mais ne pas en rajouter sur l'existence d'un droit local alsacien car il concerne surtout le droit privé et non les institutions. Il fallait abonder dans le sens de l'auteur pour dire que si on peut commencer une fusion, commencer par une petite fusion entre des gens qui s'entendent bien, c'est effectivement l'idéal. La loi du 16 décembre 2010 donne les outils pour relancer les fusions en France. Le président alsacien est justement le Ministre qui a fait adopter cette loi !!! Il était logique que l'UMP soit pour cette réforme, qui résultait d'un long consensus parlementaire (puisque la gauche n'a pas abrogé cette partie de la loi). Le fait que Hollande et Ayrautl soient favorables à la fusion en Alsace devaient vous alerter sur le fait, que c'est vraiment devenu un enjeu d'ECONOMIE. L'Etat donne de moins en moins d'argent aux collectivités, donc il faut qu'elles fassent des économies, qu'elles soient moins nombreuses...



B) La régionalisation

Au delà du problème des économies, le texte abordait la question de la "régionalisation", à savoir la tendance à regrouper les institutions au niveau régional. Vous pouviez évoquer la RGPP, mais brièvement comme une tendance seulement, car la RGPP s'applique à l'Etat et pas officiellement aux collectivités locales, qui elles sont "autonomes" (pas indépendantes !).
Tendance pour s'adapter à l'Europe des régions.
Les conseils généraux ont failli disparaître à terme avec l'adoption du "conseiller territorial"
mais l'idée d'une collectivité territoriale unique peut aussi faire peur car elle évoque davantage que la seule régionalisation, avec des particularismes reconnus ailleurs (Corse, Outre Mer). Mais l'Alsace n'est pas du tout en véléité similaire d'autonomie/indépendance. Il est excessif d'aller dans ce sens dans la copie.


II) Le référendum local, un outil à double tranchant

Le référendum n'était pas le sujet principal, mais il fallait développer cet aspect parce que le cours consacre une partie à la démocratie locale et au référendum local.

Les progrès démocratiques depuis la loi de 1992 sur le référendum local. L'organisation d'un réferendum, les avantages, la mise en oeuvre, les limites etc peuvent être évoqués.
Il ne s'agissait pas d'un référendum consultatif évidemment, mais il ne s'agissait pas non plus d'un référendum décisionnel classique (réforme constitutionnelle de 2003). Il fallait mentionner simplement que c'est la procédure de la nouvelle loi de 2010 qui le prévoit pour les fusions. La consultation des électeurs est d'ailleurs prévue aussi pour les nouvelles fusions de communes (les communes nouvelles). Il faut une participation minimum etc.

Il fallait dire que le référendum est presque toujours l'occasion pour les français de refuser les réformes (premier échec de la régionalisation gaullienne). Au niveau local, il n'est pas appliqué justement pour cette raison. En conclure à l'attachement des français aux collectivités de proximité. Craintes aussi des effets sur la pérennité des préfectures départementales, des cantons etc.

Sur ce point, les alsaciens sont bien plus français qu'allemands ...